Bernadette Bensaude-Vincent, professeure de philosophie des sciences et des techniques rappelait que, « toujours situé dans un entre-deux, le matériau est l’intermédiaire obligé entre la matière première — qu’il faut transformer par des réactions chimiques ou des procédés mécaniques — et le composant de l’objet technique » et ajoute : « Qu’il soit arraché à la forêt comme le bois, extrait des entrailles de la terre comme les métaux, le matériau est toujours ouvré, frappé, découpé ou fondu, réduit ou calciné, purifié ou mélangé (…) [c’est] à la fois un être de nature et un produit de techniques. » (Bensaude-Vincent, 1998, p. 37)

Avec les progrès scientifiques en termes de biomatériaux, la découverte de nouveaux protocoles de fabrication, la mise en place de combinaisons chimiques et plastiques innovantes, la notion de matériau a radicalement changé au XXIe s. et dépasse la définition traditionnelle, inspirée notamment de l’architecte du Ier s. av. J.-C., Vitruve, qui utilisait materia, pour désigner la matière première dont est constitué un objet, et plus particulièrement le bois.

La journée d’études sera dédiée à la confrontation sur de la notion de matériau entre plusieurs champs disciplinaires. La matinée de cette journée sera consacrée à l’analyse des nouvelles définitions de cet objet d’étude, à travers l’invitation de personnalités extérieures. Comment envisager aujourd’hui les matériaux, tant dans leurs usages que dans leurs implications écologiques, technologiques et sociétales ? Quelles sont leurs caractéristiques intrinsèques  et leurs spécificités ? Dans quelle mesure les matériaux ont changé de nature, à partir de quand et pourquoi ? Quelles différences entre matériaux bio, éco et géo-sourcés par exemple ?

L’après-midi sera consacrée à une approche thématique transversale des matériaux du XXIe siècle. Trois thématiques particulières seront abordées, par la participation de chercheuses et chercheurs des laboratoires de l’axe, via un appel à communication en cours :

- Les rapports entre les matériaux, l’environnement et les sociétés. Il s’agira notamment d’interroger le rapport avec la matière première dans l'évolution des sociétés et des villes, mais également l’impact environnemental de la fabrication des nouveaux matériaux, l’évolution des processus de transformation et les nouveaux enjeux en termes de respect de l’environnement.

- La question de la durée des matériaux, leur évolution dans le temps, les façons de pallier la détérioration et les effets sur la longue durée des usages ainsi que les enjeux scientifiques et économiques associés pourront être abordés. On pourra aussi s’interroger sur la redécouverte des matériaux du passé, notamment en architecture, qui permet de relever de nouveaux défis et qui oblige à reconsidérer des matériaux jusqu’ici dépréciés. La gestion des déchets, ainsi que les processu de réemploi et recyclage constituent un défi supplémentaire au XXIe siècle.

- La relation entre les matériaux et le vivant interroge l'inspiration et la création de nouveaux artefacts à partir de la nature. Le questionnement du biomimetisme et des solutions basées sur la nature comprendra un panorama sur les matériaux biosourcés, biocompatibles et biodegradables.